Par Andy
Ok, je triche. Je triche à mort, mais c’est pour la bonne cause ! Enfin, je crois… Pourquoi c’est pas du jeu ? Oh, parce que je n’ai PAS lu Anime was a Mistake, tout simplement ! Mais il y a une raison à cela : le jeu n’est pas encore édité. Du coup, difficile de se procurer le texte pour en faire la lecture. Alors, quoi ? Comment ? Par quel miracle ? Voilà l’histoire.
Tout a commencé par une nuit sans lune. Un être douteux, assorti d’un sens de l’humour à vous déglacer une poêlée de lardons périgourdins, tentait machinalement de rester debout sur une planche oblongue glissant frénétiquement sur les vagues de l’information numérique lorsqu’il fit une bien étrange rencontre… Devant lui, scintillant dans son rectangle de lumière bleu électrique, se tenait une liste de jeux de rôle téléchargeables, sur le thème des Chevaliers du Zodiaque. C’était précisément, exactement, parfaitement ce que cette forme de vie pluri-alléchée n’avait jamais pensé à pister ! C’était quelque chose qui venait titiller sa curiosité à l’instar d’un putain de battement d’aile de putain condor des Andes à l’autre putain de bout de sa putain de conscience. Je vous laisse imaginer la tronche de la tornade mentale…
Bref, un jour de glande sur le web, j’ai trouvé ce que je ne cherchais pas, comme souvent. Et ce fut une révélation, en quelque sorte — et ça, pour le coup, ça n’arrive en moyenne qu’un jour sur trois, chez moi ! Parmi ces jeux, se trouvait celui-là, appelé Guerriers du Cosmos, tenant en 32 pages A5, sans illustrations, mais mis en page proprement. Je le feuillette tranquillement, et j’y retrouve des concepts que j’ai aussi envisagés pour un hypothétique début de projet personnel. Intrigué, je le termine, m’aperçois qu’il s’agit du hack d’un jeu appelé Anime was a Mistake. Connais pas, mais bon, c’est logique après un long moment en dehors du circuit JdR.
Je me suis donc lancé à la recherche de cet Anime was a Mistake que j’ai fini par trouver. De fil en aiguille, j’ai atterri sur le serveur Discord des éditions 6napse qui sont à l’origine de Vivere, un JdR de space fantasy pour du jeu en campagnes, et de la Couvée, où les joueurs incarnent des bestioles de l’espace. Quant à Anime was a Mistake, c’est un jeu qui veut faire émerger des univers tirés de n’importe quel manga ou anime — mais ça, on s’en doutait un poil ! Il a quelques particularités intéressantes que j’aimerais vous présenter au travers de ma lecture de Guerriers du Cosmos.
Après discussion avec Quentin Forestier, il apparaît que le kit Guerriers du Cosmos est assez daté, que le système d’Anime was a Mistake a depuis évolué, à la marge, mais que le cœur de ses mécaniques est, lui, resté suffisamment proche pour que je puisse vous le décrire. Mais juste avant de commencer, je tiens à vous préciser que le jeu va bientôt — courant septembre 2021 — arriver en financement participatif sur Game on Tabletop. Et comme j’aime vraiment ce projet, je vous encourage à vous renseigner, à en parler à vos amis et à partager les publications qui tombent sur les réseaux sociaux.
Ok, vous allez finir par croire que j’essaie de vous enfumer avec ce compte-rendu, parce que le manga, je n’en lis pour ainsi dire jamais, et que je ne suis pas un acharné non plus des animes. J’en regarde de temps en temps, hein, mais ce n’est pas mon occupation principale. Et mes références datent au moins d’il y a vingt piges. Tout pour faire de moi le gars à écouter sur le sujet, en fait !
Katsuki Bakugo, de My Hero Academia, par Antoine
Alors on va nuancer un peu tout ça quand même. D’une part, parce que je suis fan de Saint-Seiya, et que j’ai grandi devant le Club Dorothée ce qui m’assure un minimum de bases, au bout du compte. Et aussi, sans doute, parce que je suis éleveur d’ados, en ce moment, et ça, ça vaut au moins un “mot compte triple”, non ? Et puis, est-ce que ça compte, au final ?
Anime was a Mistake se présente, de l’aveu de son auteur, comme un GURPS — ça y est, tout de suite les gros mots ! — qui aurait passé une habilitation “japanimation”, en quelque sorte. Il est censé permettre de jouer aussi bien du shonen nekketsu à la My Hero Academia ou Dragon Ball que de la comédie romantique à la Maison Ikkoku — merci Google ! — ou de l’horreur, même, que sais-je ? Tu veux du Mecha façon Goldorak, vendu ! Tu as envie d’un truc plus intériorisé, plus psychologique, un peu comme dans la série Dans l’intimité de Marie, où un lycéen se retrouve un jour dans la peau de la fille la plus populaire du lycée, c’est envisageable.
Vous l’aurez compris, ce jeu se veut l’émulateur de tout un genre, dans toute sa diversité. Difficile de m’étendre plus longtemps sur cette partie, ce sera à chacun de convoquer ses propres références pour se projeter dans le potentiel du jeu et les scènes qu’il rendra possibles.
Un personnage d’Anime was a Mistake/Les guerriers du Cosmos se définit par des scores, des atouts et des gimmicks. Chacun de ces éléments a une valeur en nombre de faces de dé, échelonnée entre 4 et 12. Ainsi, un score faible apportera un D4, un score élevé un D12.
Les scores sont le cœur du personnage, son potentiel, en quelque sorte. Les atouts, quant à eux, permettent d’affiner le personnage en commençant à l’individualiser un peu. Les atouts peuvent être des techniques de combat ancestrales, des objets, une matière de prédilection au lycée, une capacité à manipuler la mana, un talent inné pour le hacking, voire, dans le cas des Chev… Guerriers du Zod… Cosmos, une armure sacrée !
Qui n’a jamais rêvé de revêtir la fameuse armure de la constellation de la Coccinelle ? Qui ? Que celui qui n’a jamais essayé la chorégraphie des Météores de Pégase me balance la première Poussière de diamants ! Les atouts sont véritablement multiformes. Il faut les voir comme un vaste fourre-tout qui va permettre de “traduire” n’importe quel élément de votre univers de manga ou d’anime préféré en données techniques utilisables dans le système de résolution. Tu veux le bras cybernétique de Cobra ? Fastoche ! Tu veux l’Eva 01 de Shinji Ikari ou la moto de Shôtarô Kaneda ? Pareil !
Le personnage reçoit aussi des gimmicks qui viendront compléter notre création. Nous les abordons juste après, pas la peine de nous étendre dessus maintenant.
Du coup, il n’y a pas de liste de compétences interminables, dans Anime was a Mistake, et c’est vraiment appréciable. Personnellement, c’est quelque chose que j’affectionne vraiment. Premièrement pour la liberté que ça amène à la création de personnage — sans compter que ça allège considérablement la fiche ! Et deuxièmement, surtout, parce que ça va forcer les joueurs à être ingénieux dans l’emploi de leurs atouts, et que ça va créer de la négociation avec le MJ pour justifier cet emploi dans telle ou telle situation. Le joueur sera amené à décrire précisément ce que son personnage fait et pourquoi son bonus d’atout s’applique dans ce cas précis.
En dernier, viennent les gimmicks. Techniquement, les gimmicks sont des dés bonus utilisables sous conditions. Ces conditions peuvent être très narratives, dans l’esprit de la transformation de Son Goku en singe géant lorsqu’il possède sa queue et qu’il reçoit des ondes brutes envoyées par la lune. Il peut s’agir de hurler le nom de son attaque de manière très théâtrale lorsqu’on la lance. Imaginez Shiryû qui exécute son Rozan Shô Ryû Ha en hurlant “PAR… LA… COLÈRE… DU … DRAGOOOOOOOOOOOON”, et vous y êtes !
Un gimmick peut aussi nécessiter des conditions strictement mécaniques, en causant, par exemple, un certain nombre de blessures, ou en infligeant de la fatigue, par exemple. Là encore, grosse liberté, même s’il existe un tableau encadrant les “coûts” et les “gains” de ces gimmicks. L’idée est toujours d’inscrire une vraie spécificité dans le personnage tout en incitant fortement à enrichir son roleplay. Son roleplay, et même la narration, parfois.
En restant dans Saint-Seiya, on peut imaginer qu’un personnage soit obligé de raconter un flashback de son entraînement d’aspirant-chevalier le mettant en scène en difficulté mais finissant par un succès et une leçon apprise qui servira dans la scène actuelle. Shiryû, toujours lui, et Masque de Mort ressentent la prière de Shunrei qui leur parvient jusqu’au Yomotsu Hirasaka. À ce moment, le joueur raconte un flashback où Shiryû repense aux années d’entraînement et à sa complicité avec Shurei, ce qui le booste dans son combat dans l’antichambre des Enfers.
Noumaïos de la Coccinelle, par Antoine plus jeune
Un gimmick peut même octroyer un gros bonus si la condition pour le déclencher est proportionnelle. Typiquement, le Rozan Kô Ryû Ha de Shiryû, lorsqu’il emporte Shura du Capricorne avec lui dans cette ascension mortelle vers les étoiles, pourrait être une sorte de gimmick ultime.
Ces gimmicks sont super importants pour poser la couleur de l’univers dans lequel évolueront les héros. Ils sont à la fois des agents de saveur et des bonus mécaniques. Ils permettent également de donner plus de responsabilité aux joueurs sur la narration puisque certains d’entre eux vont demander au joueur d’inventer et raconter une partie de l’histoire passée de son personnage.
L’autre spécificité d’Anime was a Mistake, c’est son côté modulaire. L’auteur appelle ça la “boîte à bentô”. Il a développé un certain nombre d’options permettant d’insister sur certains aspects propres à certaines ambiances de mangas ou d’animes. Les guerriers du cosmos n’ayant pas de modules — ou alors directement intégrés dans le texte du kit d’initiation -, il m’est plus difficile de vous en parler en détails, mais il est assez facile d’imaginer un système d’expérience qui viendrait se greffer sur les règles de base pour faire évoluer les héros.
J’ai aussi lu qu’il existait un système d’attrition, un système de points de Destin — coucou Warhammer ! — ou même un système d’amitié qu’il faudra entretenir en jouant des scènes de vie entre les héros et leurs proches et dont Quentin Forestier dit que c’est l’un de ses coups de cœur. Autant d’options parmi lesquelles le meneur et sa table feront leurs courses pour rendre le plus fidèlement possible l’ambiance qu’ils souhaitent pour leur jeu.
J’aime vraiment cette idée, et je suis persuadé que la modularité est la seule voie possible pour rendre compte de l’extrême diversité des mangas. Et comme ces règles ne sont pas que mécaniques, mais qu’elles semblent toujours inciter à décrire ce que fait ou dit son personnage, elles sont aussi créatrices de contenu ludique.
Bon, on a donc des personnages. C’est un bon départ ! Reste à les faire évoluer dans leur monde. On va finir notre tour d’horizon d’Anime was a Mistake par quelques mots à propos du système de résolution. Pour savoir si une action réussit ou non, c’est simple. Tout dépend de cette équation : score + ( atout) + (gimmicks). Chacun des termes de l’équation amène un dé dont la valeur va de D4 à D12. Le dé de score est obligatoire, mais pas celui de l’atout — on n’en ajoute qu’un seul, normalement, sauf dans le mode “No limit” de la boîte à Bentô, paraît-il — ou ceux des gimmicks — eux peuvent se cumuler en fonction des conditions de déclenchement…
On a donc cette poignée de dés qu’on va lancer en espérant faire un gros total pour dépasser une difficulté fixée par le meneur ou par le lancer de dé adverse en cas d’opposition. Et plus la réussite est importante, plus l’action sera brillante. Si le lancer atteint le double, le triple, voire plus encore, de la valeur de difficulté, le personnage fait une réussite critique. Dans le cas d’une attaque, si une réussite simple cause un point de dégât, un total du triple de ce seuil de difficulté fera trois points de dégâts. Avec un peu de chance, il est possible de déboîter un héros d’une seule praline divine !!! ^^
Et comme il faut raconter ses actions en fonction du résultat du lancer de dés, on voit tout de suite comment l’escalade propre à certains combats dans les animes va se mettre en place. Si le score de défense est encore plus haut qu’un très gros lancer de dés, le joueur qui l’a réalisé devra surenchérir pour expliquer comment il survit à une putain d’attaque de la mort qui tue. Jouissif !
Le personnage d’Hiromi, un des pré-tirés du jeu, en version chibi
Encore une fois, et c’est un fil conducteur dans Anime was a Mistake, les règles sont créatrices de narration, et c’est la grande force de ce jeu.
Petit détail qui peut avoir son importance. Le jeu ne contient pas de bestiaire détaillé en raison du trop grand nombre d’entrées qu’il contiendrait pour contenir tous les adversaires de tous les mangas. Pour pallier cette difficulté, l’auteur a créé des profils génériques par niveau d’adversité : insignifiants, sbires, héros, boss, boss finaux et même arch boss, qui sont les méchants méchants très méchants cachés derrière les grands méchants pas sympas qui ont donné tant de fil à retordre aux PJs tout au long des scénarios de la campagne. Des sortes d’entités divines normalement indémontables, mais qui sait ?
Comme vous vous en doutez, j’aime beaucoup l’approche de Quentin Forestier sur cet Anime was a Mistake, bien que n’étant pas particulièrement un die hard fan de mangas ou d’animes. Bien entendu, ce n’est qu’une lecture, et même pas celle du texte définitif, mais, pour moi, tous les éléments sont réunis pour que le jeu fonctionne très bien et serve son propos qui est de jouer dans des univers de manga dont l’extravagance qui confine parfois au ridicule.
Les gimmicks sont la vraie bonne idée de ce système puisqu’ils vont permettre de donner sa véritable spécificité à un personnage, à lui donner vie, en quelque sorte, tout en accomplissant le tour de force d’être un élément vital d’un point de vue mécanique comme d’un point de vue narratif. Rien ne semble là pour rien dans ce jeu. Tout élément de règle est pensé pour venir soutenir l’histoire qui se raconte à la table.
Le jeu sera proposé en financement participatif sur la plateforme Game on Tabletop courant septembre. J’ai très hâte de découvrir les visuels définitifs du livre qui sera au format manga poche traditionnel et fera deux cent pages. Il y aurait encore pas mal à dire, notamment sur le choix des illustrations et du traitement graphique, mais il faut savoir raison garder ! Il se murmure néanmoins qu’il y aurait un palier de financement pour ajouter une jaquette et se rapprocher encore un peu de ce style si particulier du manga.
Un jeu aux règles simples, précises, qui cherche avant tout à respecter un canon esthétique clair, et qui incite par tous les moyens les joueurs à enrichir leur narration et à participer activement à la création du contenu ludique, je ne peux qu’être fan ! J’espère sincèrement que vous serez aussi enthousiastes que moi à son propos !
En plus, j’ai pu inclure dans ce compte-rendu du Saint-Seiya, et deux illustrations de mon aîné, réalisées à deux époques différentes ! C’est royal !!! #FiertéDePapa
Vous trouverez plus de renseignements sur les jeux des éditions 6napse à ces endroits.